Cyclamed et le Bassin d’Arcachon : un partenariat pour sensibiliser et acquérir les bons réflexes pour limiter les résidus de médicaments dans les eaux usées

Dans un souci de protection de l’environnement et de santé publique, le Syndicat Intercommunal du Bassin d’Arcachon a souhaité sensibiliser les professionnels de santé et le grand public au geste éco-responsable du retour des Médicaments Non Utilisés (MNU) à la pharmacie.

Cela permet en effet d’éviter des rejets polluants dans les eaux océaniques. Qu’elles soient pluviales, usées, douces ou marines, les eaux peuvent être des récepteurs ou des vecteurs de micropolluants. Le réseau d’expertise REMPAR mène des actions depuis 5 ans pour réduire l’empreinte des micropolluants dans le bassin d’Arcachon.

Entretien avec Adeline Thevand, Animatrice du réseau REMPAR, au sein du Syndicat intercommunal du Bassin d’Arcachon.

1. Qu’est-ce que le réseau Rempar et quel est son objectif dans la protection environnementale du Bassin d’Arcachon ?

A l’origine du réseau REMPAR qui signifie Réseau d’Expertise et de suivi des Micropolluants, Macropolluants et Micro-organismes dans les eaux du Bassin d’Arcachon, se trouve le SIBA (Syndicat intercommunal du Bassin d’Arcachon) créé dans les années 70. Il regroupe 12 communes autour de la gestion et de la préservation de la qualité des eaux du Bassin d’Arcachon. A sa création, le SIBA avait pour principale compétence l’assainissement des eaux usées pour éviter les rejets dans le Bassin puis les compétences se sont élargies, notamment à la gestion des eaux pluviales et au suivi de la qualité des eaux de baignade avec toujours une coloration de préservation des eaux du Bassin.

En 2010, la question des micropolluants a émergé dans les préoccupations sociétales et a commencé à être investiguée par le SIBA : d’abord les pesticides, en partenariat avec l’IFREMER, puis les micropolluants au sens large dont les résidus de médicaments, à la suite de l’appel à projets national « Innovations et changements de pratiques : lutte contre les micropolluants chimiques des eaux urbaines » remporté par le SIBA en 2013. Aujourd’hui, le réseau REMPAR regroupe l’ensemble des suivis historiques (azote et phosphore, microbiologie) et plus récents (pesticide, métaux, résidus médicamenteux) et est ainsi devenu expert en matière de micropolluants, macropolluants et microbiologie. Certaines investigations sont ponctuelles comme l’empreinte en résidus médicamenteux réalisée dans le cadre de l’appel à projet entre 2014 et 2018, d’autres sont récurrentes, comme les pesticides suivis tous les 2 mois.

L’objectif du réseau REMPAR s’inscrit dans la durée via une expertise solide. Il a pour objectif que chacun s’implique dans la préservation de la qualité des eaux du Bassin, dans le respect de chaque usage. « Sont impliqués des organismes scientifiques, des collectivités locales ou associatives ; des acteurs socio-économiques. Sur la question des pesticides, nous avons par exemple contribué à un dialogue constructif entre les agriculteurs et les professionnels de la mer, suivi d’actions concrètes de réduction à la source sur les grandes cultures de notre bassin versant ».

2. Pouvez-vous nous parler de l’étude que vous avez menée sur les micropolluants dans les eaux ?

L’étude, qui s’est déroulée de 2014 à 2018, ambitionnait de cartographier l’empreinte en micropolluants dans l’ensemble des eaux (pluviales, usées, douces et marines) du territoire et d’identifier, le cas échéant, leur origine, leur impact sur les organismes aquatiques, les solutions possibles de traitement. Il s’agissait aussi d’étudier nos comportements en vue d’identifier les leviers d’action pour réduire les rejets dès la source.

L’objectif de cette étude, comme de toutes les actions du réseau REMPAR, est de partager une culture commune sur les sources et les rejets de micropolluants afin que chacun adapte ses pratiques au mieux, partant du principe que chaque profession est la plus à même de proposer des évolutions profitables à l’environnement dans le respect de leurs contraintes professionnelles.

Ainsi, sur les résidus médicamenteux, le réseau REMPAR a initié un partenariat avec le Pôle de santé d’Arcachon (PSA) qui regroupe deux structures sanitaires (le Centre hospitalier Jean Hameau et la Clinique d’Arcachon) et l’ensemble des professionnels de santé du territoire.

Concernant le pôle de santé d’Arcachon, les enquêtes et analyses des eaux usées ne montrent pas de spécificités des rejets par rapport aux rejets urbains en termes de micropolluants. Cela répond utilement à une question que se posait le SIBA : à l’heure actuelle, il n’est pas nécessaire se traiter de manière spécifique les effluents du PSA. Ces derniers resteront traités de manière conjointe avec les effluents urbains du Sud Bassin.

Ce constat fait aussi apparaitre que les résidus médicamenteux observés dans les eaux sont issus de l’élimination naturelle des médicaments absorbés par les patients dans le cadre de leurs traitements. Ils se retrouvent donc dans le réseau d’eau usées. : Beaucoup de molécules autrefois réservées à l’usage hospitalier, sont aujourd’hui disponibles dans les officines de ville. De plus, le développement des traitements ambulatoires et le raccourcissement des temps de séjours à l’hôpital font que de plus en plus de médicaments sont rejetés de manière diffuse au niveau urbain.

L’élimination de ces résidus médicamenteux par les stations d’épuration s’avère très variable en fonction des molécules : ainsi l’ibuprofène et le paracétamol peuvent être éliminés à plus de 95 %, alors que d’autres (certains antibiotiques, par exemple) ont un taux d’abattement proche de zéro.

Ces connaissances montrent l’importance des bonnes pratiques de tout à chacun ; les professionnels de santé se sont montrés intéressés et regrettent que ces éclairages ne soient pas intégrés dans les formations médicales.

3. Quelles actions de sensibilisation avez-vous mis en place auprès des professionnels de santé et du grand public pour éviter les rejets des médicaments dans les eaux ?

Les connaissances acquises ont été partagées au sein du réseau et à différents niveaux :

  • Dans la communication institutionnelle de la collectivité et côté usager, l’action a été menée en partenariat avec l’INRAE (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement). Une enquête de grande ampleur a donc été effectuée en 2015 pour connaitre la vision des citoyens sur leur usage du médicament, leur collecte en pharmacie et s’ils pensaient que les médicaments pouvaient avoir un impact sur l’environnement. Les résultats de l’enquête ont révélé que les particuliers considéraient uniquement l’avantage des médicaments sur leur santé mais ne se posaient pas forcément la question de l’impact de leurs résidus sur l’environnement.  Ainsi, pour sensibiliser, les résultats de l’enquête ont été affichés dans les cabinets de médecins et pharmacies d’officines partenaires.
  • Au niveau des professionnels de santé, la dynamique s’est faite auprès des médecins de ville, pharmaciens et vétérinaires avec notamment des soirées d’information et de sensibilisation, en partenariat avec le conseil départemental de Gironde de l’Ordre des médecins, qui ont permis de susciter leur intérêt et de lancer les discussions avec des leviers d’action. « L’idée était de transmettre nos connaissances en termes de résidus des médicaments dans l’eau ainsi que les perspectives régionales, nationales et internationales concernant leur réduction sans aucunement opposer santé et environnement ».

4. Quelles sont les actions concrètes menées avec Cyclamed ?

Le SIBA a souhaité sensibiliser l’ensemble des usagers du territoire, aux bons gestes d’élimination des médicaments non utilisés qui sont à rapporter en pharmacie et surtout pas à jeter dans les toilettes ou les éviers.

Ainsi, en partenariat avec Cyclamed, des supports de communication ont été déclinés : « Je fais ma B.A, je ramène mes médicaments en pharmacie ». De même, des affiches ont été distribuées à l’ensemble des médecins et pharmaciens pour une apposition dans les salles d’attente et les pharmacies. Le SIBA a également mis à disposition un chevalet en carton, avec cette même mention, pouvant être posé sur le bureau du médecin ou en pharmacie.

Enfin, un tampon encreur, qui a remporté un vif succès, a été créé avec le même message. Il a permis aux professionnels de santé d’apposer cette phrase sur les ordonnances, soit au moment de la prescription médicale, soit au moment de la dispensation à l’officine. Ils ont été également distribués durant les soirées d’échanges. Cette très belle expérience avec le bassin d’Arcachon a donné l’idée à Cyclamed de réaliser un autre tampon encreur qui a ensuite été adressé aux 21 500 pharmacies de France (métropole et Outre-mer).

En 2021, le partenariat avec Cyclamed se poursuit avec notamment le projet de réalisation d’une vidéo qui sera diffusée sur la WebTV locale, TV BA.  L’idée étant de pouvoir interviewer des médecins, des pharmaciens où chacun adopte le geste éco-responsable du retour des MNU en pharmacie permettant ainsi de préserver la santé publique, l’’environnement et la qualité des eaux.

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